Ernest FERRAND

Ernest, Louis, Léon FERRAND, né en 1865 (n°2202 de 1874) à Paris, il s’est rendu coupable de complicité de parricide, ce qui peut paraître improbable pour un enfant « né de père inconnu » selon l’état-civil. En réalité, le père d’Ernest et de ses 2 frères était parfaitement connu, il s’agissait d’Honoré CHEVALLEREAU qui vécut avec la mère d’Ernest pendant près de dix ans. C’est dans la capitale du Département qu’Ernest fut intégré au service des enfants assistés en 1874, à 9 ans. Après deux placements successifs dans cette ville, il fut envoyé à la Colonie en novembre 1875 et s’en évada en août suivant. Placé à nouveau dans la même cité aussitôt après son évasion, il s’enfuit à nouveau deux mois plus tard. A chaque fois, Ernest invoquait comme motif de ses fuites, sa mère à Paris qu’il souhaitait retrouver.

Finalement, celle-ci le rappela auprès d’elle à Paris en octobre 1876. La presse nous en apprend davantage sur les années qui suivirent son retour à Paris. Nous savons ainsi qu’après son service militaire, dont nous n’avons pas de trace, Ernest s’établit à Paris où il exerça le métier de corroyeur. Il avait son frère Gaston, infirme, à sa charge et subvenait difficilement à leurs besoins. Le Petit Parisien relate avec précision le procès en cour d’assises des frères Ferrand dans son numéro du 6 septembre 1888. Ernest, ainsi qu’Auguste dit Honoré (né en 1861), Berthe (décédée en bas âge), Gaston (né en 1863) sont le fruit de l’union hors mariage de Julie ou Julia FERRAND et d’Honoré CHEVALLEREAU, issu d’une famille de notables près de Niort (79).

Après leur rencontre dans le Département en 1861, Julia et Honoré vécurent maritalement, avant que M. CHEVALLEREAU n’abandonne Mlle FERRAND après la guerre de 1870 pour laquelle il fut appelé. Il retourna alors dans la propriété familiale du château de la Guitardière, près de Niort, qu’il se mit à exploiter avec son frère et sa sœur. Devenu maire de Neuvy-Bouin, son passé l’a semble-t-il encombré puisqu’il cessa rapidement d’aider financièrement Mlle FERRAND, ce qu’il avait pourtant fait jusqu’en 1873. Celle-ci se retrouva rapidement dans la misère et ne put entretenir ses trois fils, qui sont tous passés par les hospices (Honoré en tant qu’aliéné, Ernest en tant qu’enfant assisté, Gaston fit de lui-même une demande d’intégration à l’AP).

Chacun de ses fils se rendirent successivement à la Guitardière pour demander à leur père de porter secours à leur mère. Sans succès ! M. CHEVALLEREAU les repoussa tous avec violence et cruauté : menace au fusil, appel de la gendarmerie, etc. Le 5 juin 1888, Gaston et Ernest se rendirent ensemble à la Guitardière avec l’intention de demander à leur père un engagement de soutien à leur mère.

Arrivés à Parthenay, ils louèrent une voiture sans conducteur et, en chemin, s’arrêtèrent à une auberge où il achetèrent la feuille de papier sur laquelle ils comptaient rédiger une demande d’audience à destination de M. CHEVALLEREAU. A proximité de la Guitardière, ils cachèrent leur voiture (leur père leur avait interdit l’accès aux écuries) et se rendirent à pied jusqu’à la demeure.

Ils furent accueillis par la domestique qui les informa de l’absence de leur père, puis leur servit à boire un verre de vin à chacun. Mais M. CHEVALLERAU, qui était bien présent, les vit et, en rage, leur intima l’ordre de sortir et commença à malmener Gaston. Ernest intervint pour dégager son frère mais M. CHEVALLEREAU le saisit alors à la gorge. Gaston, voyant son frère faiblir, saisit le revolver qu’il avait emporté pour se défendre de la menace des coups de fusil de son père, et tira en direction de M. CHEVALLEREAU. S’en suivit une bagarre avec les domestiques et la sœur du blessé, dont Gaston et Ernest purent s’échapper. Ernest porta Gaston sur son dos jusqu’à la voiture cachée et ils s’échappèrent.

Ils furent arrêtés quelques heures après par les gendarmes de Neuvy-Bouin. Lorsqu’il apprit le meurtre de son père par ses frères, Honoré, qui était interné à l’asile de Niort, se suicida le 8 août 1888. Le procès se tint en août 1888 et se solda par l’acquittement des frères FERRAND, dont l’histoire cruelle et la sincérité, corroborée par des témoins, avaient profondément ému le public.

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